AU REVOIR

Abigaëlle prit l'habitude de venir chaque jour s'assoir sur mon lit au fond de la piscine pour prendre une collation. Biscottes, petits beurres... Mais la nuit, je sentais rouler sous ma peau les miettes échappées de ces dents enfantines qui aiguillonnaient mes désirs criminels, embrasant mes insomnies. Je lui montrais comment je dessinais les auguilles a coudre d'un trait, et moins le champ en était perception plus elle éclatait d'un rire inaudible et nerveux, applaudissait, se jetant en arrière sur ma couche. Une nuit, elle vint glisser contre moi sa chair de poulette hérissée au froid polaire : c'est ainsi, sur un lit de camp, au fond d'une piscine vide où tombaient des étoiles diffuses que les seuls mots d'amour qui m'arriva jamais de prononcer dans ma vie furent à l'oreille de cette petite sourde muette. J'y mêlais dans la frénésie, des obscénités effroyables qui sortaient comme d'un ventriloque de mes mâchoires crispées. Tandis que dans des excitations asphyxiques et des tentatives orgarmisques instinctuelles, s'exaspérait sous moi et hurlait en silence la petite Abigaëlle. Je ne puis achever. Par crainte de l'expulsion que je cru imminente qui vint me torturer les entrailles, à cet instant précis où j'allais rendre l'âme, je redoutais la pétillance... Ravalant mon orgasme en pleurant je m'arrachais la sallie. Ces quelques grains et millilitres de semences me remontèrent au cerveau, y provoquant une lésion bénigne dont je ressens toujours les séquelles dans des flash backs éblouissants. Longtemps en vain ai-je essayé par des masturbations expéditives de crever cet abcès, mais rien ne fut semblable à ce soir exemplaire.